Interview avec Anne Mathieu
Pour ce nouveau portrait d’enseignante EPF, nous recevons Anne Mathieu, qui enseigne sur le campus de Troyes. Anne pratique l’apprentissage actif avec une mise en situation stimulante dans l’enseignement d’une matière pourtant réputée pour être axée sur des connaissances théoriques : le droit.
Bonjour Anne ! Pourrais-tu te présenter brièvement s’il te plaît ?
Je suis arrivée sur le campus de Troyes de l’EPF en 2010, à sa création, en tant que vacataire pour les enseignements juridiques. Il y avait alors une seule promotion d’une trentaine d’élèves !
Exerçant alors la profession de notaire, la mission de chargée de mission pour le développement du campus et la construction de notre bâtiment actuel qui m’a par la suite été confiée devait être ponctuelle, 10 ans après je suis maintenant Adjointe à la Direction, chargée du développement et le campus va encore s’agrandir !
Concernant les enseignements, je dispense aujourd’hui des cours sur les 3 promotions du cycle Licence et sur la Majeure ingénierie et architecture durable. Les matières enseignées sont connaissance de l’entreprise, droit des sociétés et droit du travail.
Est-ce que tu proposes aux étudiant.e.s des activités à faire en autonomie ? De quel type ?
La mise en œuvre de « business Games » ou « jeux d’entreprises » qui prennent la forme de jeux de rôle au cours desquels les élèves sont mis en concurrence pour répondre à un cas pratique est à mon sens l’illustration la plus probante. Le principe pédagogique de ce jeu d’entreprise est l’immersion virtuelle des élèves, regroupés en équipes, dans un environnement concurrentiel, l’entreprise, en qualité d’administrateur. Un cas concret leur est donné ainsi que toutes les informations nécessaires au pilotage et à eux de travailler collectivement en mode projet.
Tout au long du projet les élèves doivent prendre des décisions, analyser des situations, des données, décider en conséquence, analyser les résultats… A eux donc d’être particulièrement actifs et autonomes pour que cela fonctionne.
Il n’y a pas de réponse impérative comme dans certaines matières scientifiques, il y a néanmoins quelques règles à respecter :
- Ne pas oublier la viabilité (notamment économique) de l’entreprise ou du projet sur le long terme ;
- Être réactifs et capables de changer de stratégie en cas d’imprévu ;
- Se répartir les différentes fonctions de manière structurée et selon les compétences de chacun.
Outre l’apport pédagogique indéniable et l’acquisition d’autonomie, ce type de mise en situation permet aux étudiants de se rencontrer, de mieux se connaître et d’apprendre à créer des synergies professionnelles.
Comment fais-tu pour personnaliser l’apprentissage des étudiant.e.s malgré le grand groupe ? Penses-tu y arriver ?
Dans un enseignement juridique, le nombre d’étudiants n’est pas un paramètre négatif, au contraire, cela donne une émulation, permet des échanges, des débats, des partages de connaissances et d’opinions.
Pour l’avoir testé à de nombreuses reprises lors de mes interventions, les étudiants sont bien plus actifs lorsque l’enseignement magistral ou la correction d’un travail à réaliser n’est pas systématiquement à la disposition du groupe au travers d’un polycopié de cours par exemple.
De ma propre expérience, quand un élève reçoit, dans une matière comme le droit, un cours écrit, il a tendance à être plus attentiste. L’écrit prérédigé à l’avantage de la véracité du contenu, la prise de note précédée d’échanges impose la compréhension.
Au sein dudit groupe, des discussions et débats s’instaurent, ce qui permet à chacun de confronter ses solutions, représentations, raisonnements à celles des autres. Il y a alors une multitude d’approches et de raisonnements à disposition qui permettent d’enrichir la compréhension. L’enseignant peut alors animer le débat afin de guider la résolution et intervenir sous un angle strictement pédagogique.
Quelles sont les activités les plus appréciées par les étudiant.e.s parmi celles que tu leur proposes ? Pourquoi, à ton avis ?Â
Je pense que ce que les étudiants apprécient beaucoup, c’est la mise en contexte de ce qu’ils étudient avec une mise en parallèle avec le réel. Je m’efforce d’illustrer chaque thématique proposée avec un cas concret (ex : une décision d’une juridiction, la lecture d’un contrat, un témoignage de professionnel…)
Les élèves apprécient particulièrement échanger avec divers acteurs :
- du monde judiciaire (juges, avocats, huissiers, mandataires, chefs d’entreprises, rencontres avec des élèves incubés…) ;
- du monde de l’entreprise avec la visite des lieux dédiés (tribunaux, CCI, incubateurs d’entreprises, technopoles, …).
Outre leur retour direct, un bon indicateur de l’intérêt porté par les étudiants à ces initiatives est la continuité qu’ils souhaitent y donner, à posteriori.
Quelle est la définition que tu pourrais donner d’un.e enseignant.e innovant.e ?Â
Pour moi l’innovation pédagogique n’est pas nécessairement subordonnée à l’utilisation de moyens numériques.
Regroupés sous le terme anglo-saxon « d’active learning », je crois beaucoup aux modes pédagogiques participatifs pour développer l’intérêt et l’acquisition de compétences des étudiants. Il est pour moi essentiel de confronter les savoirs au monde professionnel dont nos élèves vont prochainement être des acteurs.
Pour lire des témoignages des etudiant.e.s sur une sortie organisée par Anne Mathieu, cliquez ici.